Raphaëlle Feraille déraille avec panache et subtilité.Vivement qu’elle revienne sur scène !

Raphaëlle Feraille présentait le 8 février dernier, sa galerie de personnages inquiétants et attachants. Drôle, vive, mordante, on a hâte de la revoir sur scène.

Enfin une fille qui dépose sur scène autre chose que ses déboires sentimentaux ! Du haut de ses 29 ans, Raphaëlle Feraille insuffle un peu de légèreté et beaucoup d’imagination à ce milieu de l’humour au féminin qui en manque considérablement. Désolée mais je suis lasse d’entendre sur scène des histoires de filles plaquées ou bourrées (ou les deux en même temps, l’un étant peut-être la conséquence ou la cause de l’autre) qui pensent que broder autour de leur misère affective et sexuelle suffit à faire rire. Certaines trouvent le thème si drôle en soi qu’elles font l’impasse sur l’écriture, le style et la mise en scène. A l’arrivée, on n’assiste pas à un spectacle digne de ce nom mais à la quasi retranscription de banales conversations téléphoniques de copines qui  s’écoutent et (s’)ennuient.

Ce n’est pas tellement leur sort qui me navre (plaquées ou/et bourrées, on l’a toutes été) mais le fait qu’elles ne fassent rien de la tristesse, du dépit, de la douleur que ces déchirures provoquent. A quoi sert-il de d’écrire l’ennui d’un célibat subi, sans la moindre rage, les moindres ambition et intention et, bien souvent, sans la plus petite once de recul et donc d’humour ? Je sais, n’est pas Elisabeth Buffet qui veut et rares sont les filles qui ont la subtilité de Nora Hamzawi. Les jeunes humoristes qui veulent écrire autour de la défaite sentimentale et du célibat traversé comme une morne plaine gagneraient à revoir le premier spectacle de Bubu. Trash et poétique et finement écrit. C’est parce qu’elles éludent la question et qu’elles laissent leur écriture être dévorée par la paresse comme les racines d’un d’arbre par la mousse que beaucoup d’humoristes peinent à faire rire et produisent finalement toutes le même show.

Raphaëlle Feraille (site de l’artiste).

Aussi quand je tombe sur Raphaëlle Feraille qui s’est affranchie de tout cela et propose autre chose que le chapelet de vannes éculées que tout le milieu du stand-up se refile, je suis heureuse. Vraiment. Et j’espère que la représentation qu’elle a donnée le 8 février au Théâtre du Temple, à Paris, donnera l’idée à la direction de ce lieu ou d’autres de prolonger ce rv avec les spectateurs qui l’ont fortement applaudie.

Raphaëlle Feraille est originaire du Sud où elle a étudié le théâtre dès l’âge de 6 ans et, une fois adulte, les Beaux-Arts et le montage. Deux formations qu’elle met à profit dans son spectacle : elle a le sens du visuel, parvient en un mouvement, un geste à s’inventer un monde; maîtrise le portrait et le timing essentiel au déclenchement du rire. Hors scène, c’est une jolie blonde, fine et fine, aux antipodes de Nicolette, la gourdiflette aux dents de lapin qu’elle incarne et qui sert d’introduction et de fil rouge au spectacle.

Tonton Michel, roi du tuning de trotinnettes.

Une sorte de parade de monstres dont certains sont très attachants. C’est que Raphaëlle Feraille a l’art de faire défiler des personnages singuliers qu’on n’est pas pressé d’approcher, auxquels on  ne confierait ni nos enfants ni notre hamster (même empaillé). Quand certains fabriquent des personnages de Rouille et d’os, Raphaëlle Feraille brossent les siens au fer et  à l’aïl (Feraille, fer aïl ?). Le premier chauffé à blanc vous brûle, le second vous pique. De son père, qui l’emmène à la chasse et ne tire pas que du gibier autorisé, à Pierre qui se met la tête à l’envers, en passant par son tonton Michel, as du tuning, son frère Philippe apprenti comédien et sa prof, une théâtreuse hystéro qui fait des scènes plutôt que d’en jouer, Raoul son fiancé et improbable jongleur de rue, sa grand-mère cantatrice…tous les petits personnages de Raphëlle grattent là où il faut et nous rappellent, sans doute, des êtres qui nous sont plus familiers qu’on n’le croit.

Des veules, des vilains, des tordus… mais pas que. Au milieu de cette espèce peu fréquentable mais que le jeu de la comédienne, jamais moqueuse, finit par rendre attendrissants, Raphaëlle Feraille introduit des petites scènes qu’elle gagnerait à tourner en video et poster sur le web. En une douzaine de sketches courts et rythmés, l’auteur et comédienne parvient à installer un univers tragi-comique au ton corrosif et définitivement drôle. Un vrai bonheur !

J’AI ADORÉ: 

  • Nicolette, cette jeune femme de de Charleville-Mézières, cabossée de partout, rejeton d’une famille qui ne l’est pas moins.
  • Son JT surréaliste dédié aux animaux où les vaches sont des preneuses d’otages.
  • Tonton Michel pro du tuning de trottinnette.
  • Sa danse du lombric qu’on va tous adopter cet été sur les dancefloors, sur le sable et pourquoi pas sur l’autoroute pour calmer les automobilistes bougons coincés dans les embouteillages.
  • La cavale du hérisson sur l’autoroute.
  • Sa grand-mère cantatrice très poudrée qui interprète des reprises de grands tubes d’une façon très originale… et mille autres choses encore.

Retrouvez Raphaëlle Feraille sur son site :www.raphaelleferaille.com/fr/accueil.html et toutes ses videos sur YouTube.

 

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